Interview écrite

8 mars 2013
Posté par
Flora

Rencontre avec Brigitte Friederich, auteur de  » Comme un goût de pain noir « 

Brigitte_Friderich_EdilivrePouvez-vous, en quelques mots, introduire votre ouvrage Comme un goût de pain noir ?
C’est le récit des trente premières années d’une jeune femme qui a dû lutter à toutes les étapes pour atteindre ce qu’elle estimait être son bonheur. Lutter contre des liens familiaux étouffants du fait de la maladie de sa maman maniaco- dépressive, s’affranchir de l’autorité d’un père militaire de carrière, puis s’installer dans une ville qui lui était inconnue et parvenir à trouver un travail et un amoureux. Toutes ces choses qui sont dues à tous, mais souvent difficiles à atteindre. Et quand elle a enfin réussi ce parcours, la vie lui joue un mauvais tour qui l’obligera à affronter les pires étapes d’une existence.
Le récit recouvre tous les fondamentaux de la vie, les liens familiaux et leurs servitudes, la parentalisation des enfants, l’autonomie d’un jeune adulte, la recherche de l’âme sœur, la douleur face à la maladie, la mort brutale, et la fin de vie difficile et enfin la résilience. Mais même si ces lignes paraissent noires, justement elles sont traitées avec le courage et la positivité dont on peut faire preuve quand on a vingt ans, un caractère de battante et la rage de réussir. Que du positif.

Cet ouvrage est-il en partie autobiographique ?
Cet ouvrage s’appuie effectivement sur du vécu pour bien retranscrire la véracité des difficultés de la vie, mais aussi l’acharnement dont une personne peut faire preuve pour atteindre son but, celui d’une vie épanouie que l’on dit ‘’réussie’’. L’héroïne du livre, dotée d’un fort tempérament n’a jamais voulu lâcher les rênes de son existence, elle est restée maître de son destin en appliquant ses valeurs et sa morale, et j’ai la chance d’être dotée de ces traits de caractère !

Si tel est le cas, employez-vous la première personne du singulier ou la troisième ?
J’ai opté pour le ‘’je’’ pensant qu’il pouvait me permettre d’être en totale empathie avec le personnage, de vivre ses sentiments, ses questionnements, sa désespérance, mais aussi son bonheur. Pourtant à la réflexion le  »elle’’ m’aurait permis sans doute d’aller plus loin sans m’arrêter aux valeurs de jugement ou de pudeur. On devrait pouvoir écrire librement en s’affranchissant des problèmes liés au regard des autres. Malheureusement de nos jours il faut faire très attention à ce que l’on écrit et comme j’ai souhaité ne pas prendre de pseudonyme, parce que dans la vie j’ai toujours assumé mes actes, je me suis sentie effectivement limitée. Pourtant récemment l’auteure de Cinquante nuances de Grey a bien assumé !

Votre ouvrage s’apparente-t-il à un roman familial ?
Je ne pense pas devoir le classer dans cette rubrique trop restrictive. Je lui laisserai l’étiquette, volontairement très vague, d’autobiographie car il balaie tellement de sujets existentiels qu’on ne peut le réduire à une simple histoire de famille. C’est le récit d’un parcours de vie, semé d’embûches, de rencontres malveillantes, de quête du bonheur difficile à atteindre. La famille faisant étroitement partie de la construction d’un être, effectivement elle tient dans ce roman une place importante, surtout pour prouver que les sentiments ne sont pas immuables et que le fait de traverser d’énormes difficultés peut permettre aux êtres de se révéler, de tisser des liens précieux et d’arriver à aimer ceux que l’on a passé sa vie à rejeter.

Cherchez-vous à délivrer un message d’espoir face au thème de la précarité existentielle développé dans votre récit ?
Oui il y a toujours un espoir, encore faut-il croire en soi, rester maître des situations, se projeter afin de mieux évaluer la conséquence de ses choix ou de ses non choix. J’irai même jusqu’à employer le terme  »gérer sa vie ». Je suis étonnée dans mon entourage de voir à quel point les gens subissent, ont du mal à s’engager, ne se projettent pas dans le long terme pour évaluer les dégâts engendrés par leur manque de décision. J’ai tout à fait conscience qu’entre les années 70-80 où se déroule mon roman et les années 2010 tout a changé, mais le fond doit rester le même, ne pas subir, réagir, avoir du caractère, se respecter avant tout, se battre, c’est encore plus vrai aujourd’hui.

Votre écrit n’est-il finalement pas une représentation du combat de l’individu contre des liens familiaux, une morale qui l’emprisonnent ?
Les liens familiaux retracés dans ce roman sont spéciaux, liés à la maladie de la maman qui ne pouvait pousser l’héroïne qu’au départ pour sauver sa vie, puis au père qu’elle ne peut décemment pas abandonner. Ce qui lui permettra d’ailleurs de tisser avec lui des liens magnifiques. La famille est très importante pour chacun de nous, c’est la valeur refuge, c’est encore plus vrai de nos jours, mais quand elle annihile un être, il faut savoir se battre et se libérer.

A quoi renvoie exactement le pain noir : la métaphore d’une indigestion ?
Ah je n’avais pas pensé à l’indigestion ! Mais plutôt au mauvais goût du pain noir difficile à avaler. C’est en fait une expression qui signifie  »qu’on en bave » avant d’apprécier son pain blanc, période agréable qui a bon goût.

Un dernier mot pour vos lecteurs ?
J’espère avoir rendu mon héroïne attachante. Je pense que chacun de nous peut se retrouver dans l’une ou l’autre des étapes vécues par elle. Je me suis en tout cas efforcée de prouver que rien n’est immuable et que nous sommes les acteurs de notre bonheur, qu’il faut se battre, garder le cap, s’engager, bien peser ses choix. Heureusement le sort nous réserve son lot de bonnes rencontres qui peuvent changer le cours des choses, encore faut-il savoir les remarquer et rebondir. Bref être le maître de son destin, le capitaine de son âme. J’ai toujours aimé lire des biographies pour m’enrichir du vécu des autres, placer l’homme au dessus de tout, m’imprégner d’autres courants de pensée, apprendre ainsi la tolérance et l’humanisme.
Je tiens aussi à remercier Edilivre de m’avoir permis d’être éditée, ainsi que la journaliste pour m’avoir posé des questions très intéressantes.