Interview écrite

25 novembre 2013
Posté par
Flora

Rencontre avec Agedios, auteur de  » Dionysos ou Le Marin des mers lyriques  »

Agedios_Edilivre

Pouvez-vous introduire, en quelques mots, votre ouvrage ?
C’est un roman d’aventures un peu particulières, puisqu’il s’agit d’aventures merveilleuses plus ou moins extraordinaires, qui sortent de la réalité (quotidienne) pour aller se perdre dans le monde du rêve et celui de la fiction romanesque. J’emploie le mot « merveilleux », ce à juste titre, car celui-ci est un genre amérindien (cf. le « magico-real » ou le « real maravilloso »). Il introduit des personnages de fiction et des éléments ou événements plus ou moins magiques. C’est une œuvre qui par ailleurs est relativement accessible à un jeune publique. Le récit est simple mais prenant. Il permet de maintenir le lecteur en haleine tout au long de l’œuvre. Par ailleurs, on est comme plongé dans un monde féerique, avec des descriptions de la nature et de paysages qui font rêver. Immergé tout entier dans un univers sentimental, on peut dire aussi que cette œuvre est typiquement « romantique », dans un sens cependant plus « moderne ». C’est finalement un mélange de genre où même le surréalisme est notable. Un peu déjantée d’ailleurs, à certains égards… On ne pourra que jubiler à lire cette prose poétique et se passionner sous les mots quelques peu troublants et déroutants du capitaine lui-même dont le discours se veut didactique.

Pourquoi avoir intitulé votre roman Dionysos ou Le Marin des mers lyriques ?
« Dionysos » parce que le capitaine de ce roman s’appelle lui-même « Dionysos ». Et puis tout simplement en hommage à ce dieu « divin » du vin, de l’ivresse, et de l’extase mystique, qui pour moi est aussi le dieu « romantique » par excellence : le dieu de l’âme humaine et de ses sentiments fous, déchaînés, aussi troublants que foudroyants ou encore pathétiques et émouvants. Tout donc dans le titre est connoté au même champs lexical. Dionysos est également pour moi un dieu des mers, un dieu du voyage, et ce voyage lui-même, qui s’effectue ou se réalise à travers mers, est pathétique et émouvant, emprunt de lyrisme, d’esthétisme et de sentiments aussi bien tristes, nostalgiques, qu’enchantés, joviaux, gais ou joyeux.

Votre pseudonyme est Agedios. Qu’est ce que cela signifie ?
« Agedios » vient du grec, et signifie « le protecteur ». C’est la retranscription de mon prénom « Gilles » en grec, tout simplement… C’est un aussi un pseudonyme qui sonne bien. En tant qu’ « anarchiste », cela me permet de prendre la mesure de moi-même et de me considérer comme mon propre maître, mon propre « dieu » : souverain de moi-même. Aussi je ne souhaite pas être vénéré ou adulé par ce nom, mais tout simplement donner un exemple d’humanité : (car l’homme est un « dieu » qui s’ignore…) « que l’on commençât à s’estimer soi-même », disait Nietzsche, cela permettrait peut-être à un peuple moutonnier de se révolter plus librement et d’accéder à sa souveraineté, au lieu que de se résigner à suivre les ordres absurdes de « ses » riches dirigeants, puissants et corrompus. « Agedios » est pour moi aussi : un dieu sans frontières (ni limites), pour reprendre le terme d’une manière étymologique. C’est un « homme » à part entière (né deux fois, comme les initiés, comme Dionysos), qui a pris la mesure de lui-même et de son existence… une existence globale, « sans frontières » (sans limites). A l’instar de Dionysos, c’est peut-être aussi un dieu vivant et un homme libre, bien que sous d’autres aspects néanmoins. « Agedios » est pour moi, enfin, telle une forteresse grecque : « indestructible »… qui témoigne d’un monde meilleur possible et lutte pour un modèle social utopique : celui de la Démocratie, celui d’un monde fait de pratiques humbles et simples, où l’homme retourne à la terre… et où tous les hommes sont finalement « libres », « égaux », « citoyens du monde » et « frères ».

Quels univers votre œuvre explore-t-elle ?
Cette œuvre explore le domaine de l’âme humaine, ses passions, sans trop y pénétrer cependant pour ne pas sombrer dans l’art décadent et la pathologie. (Car il est facile de succomber à des états d’âmes pathologiques pour dire tout et n’importe quoi, surtout de nos jours). Ainsi cette œuvre se veut « classique », à proprement dit… et s’extirper de la décadence… bien qu’elle en soit le reflet, à la manière, peut-être, de l’œuvre homérique témoignant de l’hellénisme (pré-christianisme) qui eut cours en réaction au judaïsme et sa mauvaise influence sur la période classique. Elle explore également le domaine du rêve et de l’inconscient : comment notre vie réelle et imaginaire sont-elles finalement intimement liées. On s’apercevra alors que dans l’œuvre, « Dionysos ou le marin des mers lyriques », le rêve et le domaine de l’inconscient nous détermine tout autant que la réalité elle-même. A noter : l’aspect freudien de l’œuvre. Avis donc aux ami(e)s sociologues : pour relativiser le « déterminisme social » et l’étendre au domaine de l’âme humaine, de l’affectif et de l’inconscient (autrement dit le caractère strictement personnel et moral de la personne humaine… et de surcroît : quelque chose de plus « métaphysique » et « spirituel » que strictement « matérialiste » et « scientifique »). A méditer !

Vous entretenez dans votre roman un flou entre le réel et la fiction. Pourquoi un tel choix ?
Il n’y a tout simplement pas de limites véritables entre le réel et la fiction, dans la réalité. Pour se protéger, dans notre vie quotidienne, et dans nos sociétés modernes actuelles, on offusque le monde du rêve, celui de l’inconscient et de la fiction. Le monde des affects et des passions également. Mais c’est de la névrose pure et dure, typique à nos sociétés modernes actuelles, et à imputer directement au « christianisme » selon moi. Car il est malvenu de « rêver » ou bien encore de « fantasmer ». Cela remonte à l’inquisition (et même bien avant) : les rêveurs sont considérés soit comme des fous, des hérétiques, des possédés, soit comme des idéalistes et des utopistes (cf. les véritables évangélistes qui existent en ce monde, qui ont resurgi avec la mouvance hippie des années 60, et qui sont encore et toujours de nos jours considérés par « notre » beau monde chrétien ou « empire chrétien de l’Europe ou d’occident », comme des « outsiders », des « malades », des « dégénérés », des « psychotiques », des « fous à lier » ou je ne sais quoi d’autres).
Et puis pour revenir plus concrètement au roman, on s’aperçoit au final que tout est « réel » : les rêves ne sont ni plus ni moins que des souvenirs quelques peu déformés, qui resurgissent de l’ombre de notre mémoire, ou bien des événements futurs qui vont advenir et nous éclairent dans notre vie présente. Ensuite, et ce pour finalement répondre à la question, je dirais que je suis hanté par mes rêves, comme le jour pas la nuit, ou comme l’homme par la femme… il est parfois difficile de savoir, non pas si nous rêvons ou pas (quoique cela me soit déjà arrivé, prenant mon rêve ou mon cauchemar pour réalité), mais si la réalité que nous vivons est bien « réelle », quant à elle, tant elle se présente parfois comme « terrible », « effroyable », « cauchemardesque », ou bien l’inverse, mais plus rarement de nos jours, comme « extatique », « paradisiaque ».

Vous avez écrit ce roman assez jeune. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur cet ouvrage ?
J’avais peur lors de la publication. Car cela faisait déjà un moment que j’avais écrit cette œuvre. J’avais peur qu’elle manquât de maturité, et puis aussi de style (littéraire) et de rhétorique. Mais finalement, je la relis quelques fois, et je suis assez satisfait, avec le recul. Je dirais même que je suis agréablement très satisfait de cette œuvre – qui n’est pas parfaite, loin de là, bien entendu… mais représente cependant une « mine inépuisable de ressources vitales et humaines » : un véritable « trésor ». Peut-être est-ce le seul trésor de « pirate » (pour faire référence au contenu du livre lui-même) que je récolte moi-même au bout du compte… dont l’un parmi les œuvres de ma « vie littéraire ». J’en suis très satisfait. C’est vrai. Je me demande même si je serais capable de réécrire un tel roman, et je crois bien que non. Il fallait que ça sorte, en effet, à ce moment là. Et heureusement : c’est « sorti » de l’imaginaire en fusion… dicté par l’inspiration. Maintenant j’ai certes d’autres choses à exprimer, mais je me reconnais toujours dans « Dionysos ou le marin des mers lyriques », bien que j’ai évolué depuis. Et cela ne se démodera pas.

Quel rôle a joué et joue l’écriture dans votre vie ?
L’écriture est tout d’abord pour moi un moyen thérapeutique d’exorciser mon refoulé, à la manière d’une psychanalyse. C’est aussi ce qu’elle fut pour moi en écrivant ce bouquin semi-autobiographique, bien que largement romancé. Et peut-être à mes tous débuts également, tout particulièrement, où j’ai commencé à écrire, à l’âge de 12, 13 ou 14 ans. Et puis elle est progressivement devenue un moyen de communiquer ma pensée, mon ressenti et mes connaissances, un moyen de transmettre un savoir, se voulant alors plus « didactique » que faisant l’objet d’une « thérapie personnelle ». J’aime écrire, il est vrai. Mais pas simplement pour le plaisir des mots. Je pense que celui qui n’a pas ce plaisir en lui quand il écrit, alors n’est pas « littéraire » (sinon « scientifique »). J’ai ce plaisir, mais aussi celui d’enseigner. Je pourrais me passer d’écrire, mais dans ce cas là il faudrait que j’enseigne par la parole. Or de nos jours, on vit dans une société dite « théorique », où l’écrit et son argument pèse beaucoup plus que la parole. Et tout est si complexe, dorénavant… comment pourrait-on se passer d’écrire pour communiquer, démontrer, prouver, et expliquer le monde ? C’est que mon travail d’écriture n’est pas seulement littéraire, c’est aussi un travail scientifique de longue haleine d’une certaine façon : d’exploration (sociologique, psychologique…), de compréhension, de synthèse et de solution.

Un dernier mot pour vos lecteurs ?
Allez lire ce livre. Il ne vous en coûtera rien. Et en plus il vous ouvrira l’esprit, fatalement, sur ce que fut et peut être un renouveau de l’art et de la culture grecque de l’antiquité (qui mettait en garde contre les aléas de l’âme et la volonté de domination de l’esprit). C’est un livre passionnant, relaxant et didactique. Trois bonne raison donc de le posséder dans sa bibliothèque. La quatrième : c’est qu’il est publié aux éditions Edilivre (« imprimerie verte et écologique », ce qui ne vous en coûtera rien non plus pour votre santé – et ça, c’est important !).