Tous les 2e mercredi du mois

Les capitales majuscules

Nous savons tous qu’une phrase commence toujours par une majuscule, c’est la base même de l’écriture. Bien entendu, les noms propres n’échappent pas à cette règle. Mais qu’en est-il de son usage en dehors de ces deux cas qui nous sont familiers ? Car, il faut bien le dire, la typographie est bien complexe. Nous allons donc aborder les principaux sujets la concernant. Mais avant toute chose, il faut rappeler le fait que la majuscule permet de faire le distinguo entre un nom commun et un nom propre. En l’occurrence, cela peut nous éviter certaines confusions qui pourraient être malheureuses. À titre d’exemple : « J’ai croisé sur mon chemin le Boudin du village voisin… » Il ne s’agit pas là d’une insulte envers une personne, mais bien de son nom qui lui est propre, d’où l’usage de la majuscule (sous-entendu qu’il y aurait plusieurs Boudin dans les environs). Mais aussi, il faut prendre en compte l’importance d’accentuer les majuscules dans l’optique de respecter l’orthographe d’un mot. Prenons pour exemple le mot « éphémère », soit « ÉPHÉMÈRE » : si l’on fait abstraction de son accentuation, cela donnerait « EPHEMERE », soit « ephemere » ! Et c’est le couac ! Ce mot n’a alors plus aucun sens. Commençons notre petit tour dans le monde mystérieux de la majuscule.

 
La majuscule dans la phrase :

Comme susdit, il est logique de mettre une majuscule au début d’une phrase ou après un point, un point d’exclamation ou un point d’interrogation qui la termine.
— La mer était déchaînée. Le bateau a chaviré.
— Que me dites-vous là ? Je ne saurais y croire !
Toutefois, si les points d’exclamation ou d’interrogation sont utilisés à l’intérieur d’une phrase afin de faire une remarque ou d’insister sur un point, alors la majuscule n’a plus lieu d’être.
La tour du château, hélas ! n’a pas su résister aux assauts de l’ennemi.
Notre indic, sait-on ? pourrait retourner sa veste.

Lors d’une citation entre guillemets précédée d’un deux-points, la majuscule est impérative.
Le docteur lui dit : « Ouvrez la bouche. »
Mais elle est à oublier si la citation est suivie d’une virgule.
« Ouvrez la bouche », lui dit le docteur.

Dieux et saints :

Si l’on cite Dieu comme seul et unique, alors la majuscule s’impose, ainsi que pour les termes qui lui sont attribués :
Ô Toi l’Éternel, le Tout-Puissant, le Créateur, notre Dieu, nous Te vénérons !
Oh, bon Dieu ! J’ai oublié mes lunettes !

Par contre, si l’on parle de plusieurs dieux, tels que ceux de l’Olympe, ou si l’on veut désigner une personne exceptionnelle, dans ce cas, la minuscule est de mise :
Voici le temple du dieu Apollon.
Grand merci, vous êtes un dieu pour moi !

Mais en typographie, à quel saint se vouer ?! Là est un point important à aborder. En effet, il est fait usage de la majuscule seulement lorsque le saint désigne :

  • Un nom propre, une rue, une fête, un lieu, un monument ou bien un ordre (le trait d’union est alors à ajouter) :
    La rue Saint-Martin
    La fête de la Saint-Jean
    Le parc Saint-Michel
    Antoine de Saint-Exupéry
    L’église Saint-Paul
    La Sainte-Chapelle
    L’ordre de Saint-Lazare
    Sainte-Lucie
  • Une expression religieuse ou historique :
    Le Saint-Siège
    La Sainte-Alliance
    Le Saint-Empire
    Le Saint-Esprit
N.B. : Si l’on parle de Marie, mère de Jésus, nous emploierons la majuscule : la Sainte Vierge.

Mais on fera l’usage de la minuscule pour nommer un saint ou lorsqu’il s’agit d’un nom commun composé :
Les automobilistes font appel à saint Christophe.
J’ai acheté du saint-nectaire en fromage et un saint-honoré en dessert.
Nos voisins ont un beau saint-bernard.

Titres de civilité :

La majuscule est souvent mise à contribution pour les titres de civilité, pourtant c’est une erreur dans la plupart des cas. En effet, l’on fait appel à la minuscule lorsque l’on parle à ou d’une personne :
Bonjour, monsieur le ministre.
J’ai vu madame Dupont ce matin.
Mais, monsieur, je l’avais bien compris !
Un monsieur vous demande.
Par contre, la majuscule reprend sa place :

  • dans une correspondance :
    Madame, Monsieur, Je vous prie de croire, Madame…
    Monsieur le Maire,
    Bien cher Monsieur Leduc,
  • dans un emploi historique :
    Monsieur (le frère du roi)
    Madame Mère (reine mère ou mère d’un empereur)
    Mesdames (filles de la famille royale)
  • et pour souligner le respect :
    Où Monsieur veut-il aller ?
    Est-ce que Madame est satisfaite de sa tenue ?
    Un homme souhaite vous rencontrer, Monsieur.
Les institutions :

Nous mettrons une majuscule aux institutions ou organismes uniques dans un pays, un continent ou à l’échelle mondiale :
Le Conseil de sécurité de l’ONU
La Cour suprême
Le Conseil d’État
La Haute Assemblée
L’Assemblée nationale
Le Conseil de l’Europe
La Cour des comptes
Toutefois, la minuscule reprend du service lorsqu’il s’agit d’organismes dits multiples :
La mairie d’Amiens
La préfecture de l’Aveyron
La cour d’assises des Yvelines
La cour d’appel d’Avignon
Le conseil général de l’Oise

L’État ou l’état ? That is the question ! :
  • La majuscule est de mise dès lors que l’État désigne un pays ou son gouvernement :
    Le secrétaire d’État
    L’État français
    Un coup d’État
  • La minuscule réapparaît lorsqu’il s’agit d’une position sociale ou d’une façon d’être :
    Un état d’esprit
    L’état civil
    L’état-major
    L’état de la route est déplorable.
  • Mais aussi lorsque l’on parle des ordres de l’Ancien Régime :
    Le tiers état
    L’état de la noblesse
    Les états de Bretagne
    Les états généraux
    (sauf si l’on veut désigner la réunion des états de 1789, dans ce cas : les États généraux)
L’Église :
On emploie la majuscule lorsque l’on veut désigner le pouvoir religieux :
L’Église catholique
La sainte Église
L’Église orthodoxe
Un homme d’Église
L’Église de Lyon
Mais on revient à l’usage de la minuscule lorsque l’on veut citer un lieu :
L’église du village
L’église Saint-Martin
Des chants d’église
L’église paroissiale

Fonctions et titres :

La minuscule s’impose devant une fonction ou un titre tant administratif que religieux :
Le pape
Le ministre
Le roi
Le président
Le recteur
L’empereur
Le révérend père
Le dalaï-lama
N.B. : On écrira, par contre, le Premier ministre, le ministre de la Culture, le ministre des Sports, le garde des Sceaux…

Périodes de l’Histoire :

La majuscule s’impose face à des époques qui ont marqué l’Histoire :
La Grande Guerre
La Seconde Guerre mondiale (et non la Deuxième Guerre mondiale)
Les Temps modernes
Le siècle des Lumières
Le Moyen Âge
La Révolution (celle de 1789)
La guerre de Cent Ans
Le Second Empire
L’Occupation
Les guerres de Religion

Les sites géographiques :

Que ce soient des montagnes, des fleuves, des océans, des chaînes, des rivières… tous ces termes ne prennent pas de majuscule.
Le mont Blanc
Le fleuve Bleu
La cordillère des Andes
L’océan Indien
Le continent africain
La fosse des Mariannes
Le cap de Bonne-Espérance
La mer Rouge
La chaîne de l’Himalaya

Avec les points cardinaux, c’est à en perdre le nord ! :

Du fait que ce sont des noms communs, les points cardinaux ne prennent pas de majuscule :
Un vent du nord
Le sud de l’Amérique
Nice se situe au sud-est de la France
La maison est orientée sud
Il en est de même pour les adjectifs (qui sont en l’occurrence invariables) :
L’enceinte est du château
La rive nord
Les portes sud
La partie ouest du territoire
Exceptions : on parlera de pôle Sud, pôle Nord, hémisphère Sud et hémisphère Nord.
Toutefois, la majuscule reprend du service quand les points cardinaux désignent une partie du globe, une région ou font fonction de nom propre :
Le Grand Ouest américain
Les pays de l’Est
Les mers du Sud
L’Est asiatique
La gare du Nord
L’Atlantique Nord
L’Afrique du Sud
C’est la période de carnaval dans le Nord
Les relations Est/Ouest

Les vins… c’est une histoire de verre :

Parlons un peu de ce breuvage. Un bon vin de Bordeaux, tel un merlot, ça vous dit ? Entre les majuscules et les minuscules, on se noie. Alors tentons de comprendre tout cela.
Si l’on parle de la région d’un vin, alors la majuscule a toute sa place :
Un vin de Bordeaux
Un vin de Bourgogne
Un vin de Porto
Par contre, si l’on parle d’un vin d’une région, là, c’est la minuscule qui remporte le tournoi !
Un verre de bordeaux
Un bourgogne aligoté
Un madère
Un cognac ou un armagnac pour finir le repas ?
Et si l’on parlait des cépages ? Eh bien, là aussi, la minuscule est gagnante :
Un merlot
Un cabernet-sauvignon
Un gewurztraminer
Mais qu’en est-il des domaines ? Ah, là, c’est la majuscule qui se rappelle à notre bon souvenir :
Un champagne Veuve-Clicquot
Un gaillac de Labarthe


Conclusion

Bref, tout ça pour vous dire que la majuscule est capitale pour donner un sens à un texte. Nous ne vous avons présenté que quelques exemples, il y a tant à dire sur ce sujet ! C’est un domaine, il est vrai, complexe, mais c’est toujours bien de faire bon usage de notre bonne amie la capitale… oups ! la majuscule. Mais notre chère minuscule, qui a pour petit nom « bas de casse », a aussi sa place à protéger. Donc, à vous de les défendre dans vos récits, elles ont été suffisamment mal usitées.