Rencontre avec...

12 avril 2012
Posté par
Marie

Rencontre avec… Yasmina Amziane-Danges

 

Yasmina Amziane-Danges , Le syndrome du cœur battu est votre dernier  ouvrage publié chez Edilivre.  Pouvez-vous nous décrire ce livre en quelques mots ? Ce livre dénonce. La violence, les actes de maltraitance choisis dans l’éventail large (violences familiales quotidiennes, violences dans les milieux soignants, volontaires ou non, avec toutes, un point commun : le huis-clos. Il aborde ce que l’on nomme dans le jargon médical, l’ESPT (syndrome de stress post-traumatique), en relatant l’histoire d’une enfant maltraitée qui plus tard, à l’âge adulte, va se heurter à autant de situations, rencontres et échanges porteurs de violence. Il retrace un parcours de mise en lumière, compréhension des mécanismes qui conduisent à reproduire à l’infini. Il touche les consciences, éveille un regard sur le « Corps Soignant  » hospitalier et la face cachée de son vécu.  On y trouve enfin des clés pour un meilleur avenir, de meilleurs échanges, une meilleure compréhension des lois de la pensée, du ressenti et de la volonté, de l’action. Un ouvrage complet, je pense.

Qu’est ce qui vous a poussé à dénoncer par écrit les violences que vous avez vécu ? Un trop plein d’injustices cumulées, vécues durant l’exercice de mon métier au sein de l’Hôpital : violences à bas bruits puis une agression de trop, de la part d’un patient qui, selon mon analyse, n’avait rien à faire dans notre service de gynécologie-pédiatrie. Tout comme l’affiche l’illustration de couverture, la révolte a gagné non seulement ma conscience mais aussi mon cœur, mon corps. Ce cœur et ce corps qui d’un coup, d’un seul, ont fait éclater le carcan d’années de silence, les couches de non-dits tout autant que les peurs de représailles certaines. Mais pas seulement. Les premières semaines de douleur couvée, ont fait place à une volonté ferme et déterminée de mettre à jour les violences et maltraitances que chacun d’entre nous peut être amené à subir, sans pour cela avoir la possibilité ni encore même l’idée d’en parler, de pousser le courage jusqu’à dévoiler des faits, des  violences feutrées ou cachées, subies aussi dans le cadre  d’une profession non suffisamment reconnue à sa juste valeur, avec tous les risques qui lui sont inhérents y compris ceux mettant en danger la propre santé et parfois la vie même des soignants. C’est un souhait de faire bouger et avancer les choses, que les pouvoirs publics tout autant que tout individu confronté un jour à la violence, la maltraitance, qu’elles soient isolées ou répétées, individuelles ou collectives changent leurs vues, leurs réactions, actions ou inactions sur ce fléau social qui se déverse chaque jour davantage dans nos vies, nos relations familiales, sociales ou professionnelles, nos relations à la nature qui elle, en subit à la démesure… Même si, au travers des lignes de cet ouvrage, c’est essentiellement des milieux soignants dont il est question en matière de faits, situations et vécus de violence au sein du travail. Il est utile de savoir que les séquelles en sont parfois indélébiles : le Syndrome de Stress Post Traumatique y est décrit de manière simple mais n’en retrace pas moins, les effets pervers qui affectent les victimes de violences, en l’occurrence les enfants maltraités qui plus tard, à l’âge adulte tendront à reproduire souvent leur vie durant – si le silence perdure – des situations, rencontres, ou faits empreints et porteurs de violence.

Quel message voulez-vous faire passez à vos lecteurs ?  Que toute violence, qu’elle soit subie ou bien infligée à autrui (tous règnes confondus) ne surgit pas du néant ni ne va nul part. Il y a un « avant » et un « après ». Un « après » qui transforme une vie à tout jamais, si tant est que l’on aura la chance de prendre le chemin d’une prise de conscience graduelle visant à comprendre, se connaître et se re-connaître dans l’autre, qu’il ne suffit pas de se taire en se disant que l’oubli viendra tout effacer et que « tout » redeviendra comme « avant ». Que la fatalité n’est pas un terme à garder dans le grenier de nos pensées, nos ressentis, nos volontés d’actions, nos actes.  C’est déjà, accepter qui l’on est et ce que l’on a pu vivre ou faire vivre pour se donner les moyens de cheminer vers le bonheur, la paix, le soutien mutuel et la fraternité. Chacun, au niveau qui est le sien, peut et se devrait de porter  la responsabilité du bien-être commun et en cela, prendre soin de ses propres pensées, ses sentiments, ses désirs et ses actes. C’est cela le chemin vers la paix, la paix véritable, celle qui naît de l’intérieur !

Avez-vous vécu l’écriture de ce livre comme une revanche jubilatoire ou comme un plongeon douloureux dans vos souvenirs ? L’écriture de ce livre fut une volonté de revanche qui a porté ses fruits, du moins je commence à prendre conscience de  son effet thérapeutique, certes, mais je découvre à mesure des jours, depuis la publication de l’ouvrage, que ma vie a pris un tournant décisif, avec son tumulte de confusions et besoins de changer de « vibrations » c’est-à-dire d’aborder la joie, l’envie de partage de manière bien différente, de réaliser mes souhaits les plus chers et longtemps enfouis et aussi celui d’avoir dès à présent les yeux d’avantages ouverts sur les êtres, les choses et ce qui s’y cache de beauté et d’amour ; les oreilles plus sensibles à la richesse des échanges ; un sens du goût qui reprend ses droits – au propre comme au figuré -, en bref, il s’agit peut-être d’une nouvelle naissance. Jubilatoire, à certains moments sans doute, mais je ne pourrais toutefois l’affirmer vraiment. J’ai écrit ce livre en un mois seulement. Plonger dans mes souvenirs me fut très douloureux parfois, intense tout le long ; apaisant après avoir terminé certains chapitres, avec la sensation d’avoir enfin évacué l’insupportable… Ce fut aussi source de prises de consciences salutaires, de compréhensions fulgurantes, de recomposition d’un puzzle qui soudain prenait un sens. Cela ressemble à concevoir puis faire grandir un enfant dans son ventre. On le nourrit au mieux, l’on en prend soin mais aussi on le reconnaît comme prenant peu à peu son autonomie et sans le vouloir, au fil de l’écriture, le livre vous échappe et c’est Lui qui s’écrit… La fin m’est venue de manière joyeuse, presque jubilatoire comme vous le dites ! Je suis fière de mon « bébé »… Bon, il n’est pas né tout seul : il y a eu la collaboration de toute l’équipe éditoriale que je remercie vivement, mais aussi le précieux accompagnement de « La Fée Lilas » durant la gestation de mon livre et qui saura se reconnaître… un gros, gros merci à elle… avec tout plein de bisous. Il y eut des douloureux plongeons, d’autres curieux ; et fort heureusement des voyages jubilatoires.

Qu’est ce que l’écriture de ce livre vous a apporté ?  La paix de l’esprit, en premier lieu alors que j’en attendais le contraire ! Je me sens libre et avec l’envie de croquer la vie à pleines dents. Il y a également une certaine crainte face à l’acceptation que pourra bien  avoir la lecture de l’ouvrage par mes proches ou amis… c’est humain, je crois ! Mais, n’ai-je pas eu l’audace de l’écrire ? Il m’appartient maintenant de mener sa promotion à bon port, que j’espère large et fructueuse.  Cela m’a apporté, aussi, une forte volonté de médiatisation des sujets abordés ; en télé, radio, comme dans d’autres médias. Avis aux intéressés !…

Vos premiers ouvrages sont dans un tout autre style d’écriture, pourquoi ce changement et pourquoi maintenant ? Je n’ai pas de style d’écriture déterminé pour tous mes ouvrages. Les premiers ouvrages me semblaient requérir une écriture en poésie classique symbolique, plus encline à suggérer, influer, retracer ce que j’avais à dire, à transmettre.  Le syndrome du cœur battu s’inscrit davantage dans « le récit » avec tout ce qu’il comporte : actualité, mordant, simplicité ; véracité. Le présent style me semblait davantage convenir pour le sujet traité. Plonger le lecteur dans l’actualité, la dure réalité du sujet demandait précisément ce style. Pourquoi maintenant ? Sans doute ne suis-je plus encline à me protéger derrière « l’écran » de la poésie, comme me l’a dernièrement dit Clara Duchet, à qui j’ai dédié en partie ce livre. Ouvrage également dédié à Nadine, ma chère sœur ; à Claude, qui sait ce qu’amitié veut dire et à Bibyane que j’aurais aimé connaître en personne. Je l’ai dédié à « la Fée Clochette » aussi, mais cela, n’allez pas lui dire !…

Avez-vous d’autres projets littéraires ? Oui, un… en gestation. Il s’agit d’un roman initiatique pour la Jeunesse dont je préfère garder au secret le sujet, pour l’instant. Vous voyez, j’aime aborder divers styles ! Qui sait,  à l’avenir un bon polar ? J’en suis même certaine…