Interview écrite

Rencontre avec Michel C. Mora, auteur de « Les Veilles »
19 mai 2015
Posté par
Flora

Rencontre avec Michel C. Mora, auteur de « Les Veilles »

Michel_C_Mora_EdilivrePrésentez-nous votre ouvrage ?
Un conteur aveugle de la place Djemaa El-Fna à Marrakech est le messager, le héraut, le chantre d’une dynastie de conteurs qui transmettent un “savoir plus vieux que le déluge” c’est-à-dire que par la voie des légendes, des fables, des sagas, des mythes, des épopées toute l’histoire des humains revit dans ces veillées en essayant de retrouver la profondeur, la fraîcheur et la pureté de l’origine.

Que signifie votre titre ?
Un jeu de mot un peu simplet. “Les veilles” autour du feu où, depuis l’origine de la parole, s’échangent les questions fondamentales de l’homme qui est un étrange animal capable d’accéder à “L’éveil”

Pourquoi avoir écrit ce livre ?
Pour essayer de rassembler plus d’un demi-siècle de recherche sur ce qui me parait être fondamental pour l’être humain : existence ou absence de divinité, étude des mythes et symboles religieux.
Je défini le mot religion par la racine “relier”. Quadruple liaison :
– lien entre les sombres racines du passé et l’espoir clair d’un futur,
– lien entre les ténèbres souterraines et la lumière céleste,
– liens rituels entre les puissances de la Nature et la fragilité humaine
et ce que devraient faire toutes les religions, resserrer les liens entre les humains sans exclusion.

Pourquoi avoir choisi le thème du conte philosophique, initiatique ? Qu’est-ce que cela symbolise pour vous ?
Je n’ai pas employé le mot “initiatique” qui est trop galvaudé
Pour moi l’initiation n’est pas une cérémonie secrète, mystérieuse, sectaire; c’est le simple fait qu’à un moment de sa vie un être humain va se poser une question:
«Dois-je continuer à m’enfoncer dans le monde matériel même si c’est pour atteindre un sommet … ou dois-je essayer d’utiliser les forces dont la mère nature m’a doté pour tenter de retrouver l’unité-totalité de la Vie.»

À quel lecteur s’adresse votre ouvrage ?
Les anciens sages disaient qu’il y a 4 niveaux de lecture :
– Le niveau apparent, direct, évident.
– Le niveau caché, symbolique qui permet de dévoiler une multiplicité d’interprétations qui doivent s’accepter, se partager, s’enrichir.
– Le niveau mythique, profond qui est racine des cultures, des spiritualités.
– Et enfin le niveau secret qui ne peut pas être atteint par la réflexion mais par un vécu, un ressenti, une extase dont tous les mystiques de tous les continents, de tous les temps disent qu’ils l’ont approché: c’est l’éveil au sentiment de l’univers UN.
Comme Tintin, mon conte s’adresse aux d’jeuns de 7 à 77 ans.

Pensez-vous que la transmission orale est plus importante que la transmission écrite ?
Non elle n’est pas plus importante, elle est différente et le conteur aveugle ne refuse pas l’écrit, il s’en méfie. Il démontre que dans la transmission orale il y a un échange, un va et vient entre les êtres. On choisit son interlocuteur, on adapte son discours à celui-ci au fur et à mesure du temps. La parole est vivante, elle ne va pas garder des limites précises, elle évolue, oublie, ajoute.
Par contre l’écrit fixe, grave … et dans une certaine mesure assassine. On ne sait jamais dans quel esprit tordu le verbe va atterrir et quelle folle interprétation il va faire germer.
Il y eut une certaine perte de chaleur, d’humanité lorsque la parole a été pointée par le roseau dans la glaise lors de la création de l’écriture et il est sain d’en prendre conscience avec l’actuel explosion d’internet.

Quel message avez-vous voulu transmettre à travers ce livre ?
D’abord faire connaître des récits millénaires dans ce que je pense être leur pureté d’origine et en fin de compte approcher une mystérieuse structure cyclique de la vie en 22 parties et les 10 lois absolues, éternelles que génère la vie. Cette fantastique architecture n’a pas besoin d’Être Suprême, ce sont des lois ni bonnes ni mauvaise, ni laides ni belles, ni divines ni diaboliques, elles sont.
Et c’est cette architecture qu’on retrouve à la fois dans une épopée millénaire trop mal connue, dans le Tarot, dans l’alphabet, dans la Qabbale, dans Fabre d’Olivet etc …

Quels thèmes abordez-vous dans votre livre ?
La tradition orale.
Des rites fondamentaux.
Une sagesse issue d’une période antique où l’humain n’était pas au dessus ou dans la Nature mais… “était” la Nature, en harmonie et pleinement.
Un puzzle de contes et de mythes qui s’assemblent et s’unissent.

Où puisez-vous votre inspiration ?
Dans l’immense richesse des symboles d’un maximum de religions. Je ne peux dire de toutes …

Quels sont vos projets d’écriture pour l’avenir ?
Un conte sur la vacuité qui m’amuse déjà beaucoup.

Un dernier mot pour les lecteurs ?
Si je pouvais par ce conte montrer que toutes les religions détiennent des merveilles, qu’elles possèdent toutes une part de “la vérité qui ne peut être qu’une », qu’elles ont les mêmes racines, qu’elles disent souvent la même chose avec d’autres mots que des ignorants transforment en maux trop souvent violents, qu’elles devraient toutes œuvrer à unir les humains entre eux et les unir à leur mère Nature.
Au milieu de toute cette actualité de guerre des religions mon slogan
«Si vous êtes démoralisés … Mora lisez !» prend tout son sens.