Interview écrite

Rencontre avec Didier Veller, auteur de « Bercy m’a si longtemps bercé »
21 avril 2017
Posté par
Flora

Rencontre avec Didier Veller, auteur de « Bercy m’a si longtemps bercé »

didier_veller_edilivrePouvez-vous vous présenter s’il vous plaît

Je suis marié, père de deux enfants. En tant que fonctionnaire du Ministère de l’Economie et des Finances durant toute ma vie professionnelle, j’ai fait partie des réseaux implantés à l’étranger et en province notamment pour promouvoir les exportations françaises ; j’ai été en poste en tant qu’attaché commercial puis conseiller commercial auprès de différentes Ambassades de France, entre autres dans plusieurs pays d’Afrique et du Moyen-Orient. Après trente-neuf ans d’exercice, j’ai pris ma retraite de la fonction publique en avril 2015.

 

Pouvez-vous expliquer aux lecteurs comment s’interprète le titre de votre livre ?

A plus d’un titre, ma carrière a été passionnante, tout au long de mes différentes affectations à l’étranger; j’ai eu, par exemple, la chance de séjourner quatre ans à Bagdad (de 1986 à 1990, c’est-à-dire à une période charnière pour l’Irak et la région), cinq ans à Istanbul (de 1994 à 1999, au moment de la signature de l’accord d’union douanière avec l’Europe, de l’ouverture du monde turcophone après la chute du rideau de fer et de l’installation au pouvoir en Turquie du parti religieux-conservateur, AKP). J’étais chef de la mission économique de l’Ambassade de France de 2003 à 2008 au Mali; ce pays était alors présenté comme la vitrine de la démocratie en Afrique mais l’AQMI avait déjà commencé sa montée en puissance, ce qui eut pour conséquence plusieurs échecs militaires et le coup d’état de 2012.

Après deux ans de séjour au Kazakhstan, je suis rentré en France en 2010 pour être affecté dans un service déconcentré en région. Rien n’a malheureusement été fait ni pour favoriser l’intégration au sein de ces services, des agents mutés depuis l’étranger, ni pour valoriser leur travail de promotion de l’exportation. D’où une immense frustration et un puissant ennui que seule une exfiltration aurait pu apaiser, mais rien ne s’est passé comme je l’espérais.

 

La photo de couverture mérite également quelques explications.

Cette photo vient soutenir le message déjà transmis par le titre ; je l’ai prise depuis la station de métro « quai de la gare », qui se trouve juste avant Bercy sur la ligne 6. A tous ceux (fonctionnaires ou non) qui n’ont en tête aucune autre image que la photo « officielle » du Ministère de l’Economie et des Finances, qui présente le bâtiment photographié le plus souvent de face sous un ciel d’azur et dominant de sa hauteur un environnement entièrement dégagé, je veux juste montrer au lecteur qu’il est possible d’avoir de Bercy une vision légèrement décalée. Et c’est un vulgaire wagon de métro qui, en apparaissant au premier plan, vient voler la vedette à la forteresse de Bercy.

Beaucoup de gens se rendent au ministère en métro, mais je pense qu’ils sont très rares ceux qui se sont, ne serait-ce qu’une fois, arrêté à la station précédente ; c’est le moyen de voir différemment le bâtiment qui apparaît ici comme s’il était placé au bord d’une banale ligne de métro, à moins qu’il n’ait été transformé en une sorte de voie de garage à métro ; quel qu’en soit la forme, ce décalage n’est pas inutile car il permet de relativiser la puissance du Colosse aux pieds d’argile.

 

Quels éléments particuliers ont impacté votre carrière ?

Ma carrière s’est avérée particulière à plus d’un titre, mais je pense que beaucoup de choses se sont construites en fonction de l’éloignement géographique car, quel que soit mon poste d’affectation, j’ai toujours veillé à ce que plusieurs milliers de kilomètres me séparent de Paris ; j’ai toujours considéré que ma présence dans des pays lointains et mal connus était la plus utile aux entreprises. Quant à l’accélération du temps, elle efface certes ces distances mais la baguette magique d’internet n’a pas fait disparaitre le décalage horaire.

 

Que faites-vous maintenant ?

J’ai complètement changé d’horizon ; après avoir quitté la France en mai 2015, je me suis réinstallé au Mali où je dirige le bureau de représentation d’une association française qui réalise des vidéos de formation professionnelle et d’information sur l’hygiène et la santé. Je suis très heureux d’avoir participé de bout en bout à la construction de ce projet ciblé sur le développement social, et de connaitre ainsi une expérience totalement différente de ce que j’ai pratiqué en tant que fonctionnaire.