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2 mai 2013
Posté par
AA Victoria

L’expression de la semaine : Etre le dindon de la farce

Cette semaine, nous vous proposons de découvrir l’expression : « Etre le dindon de la farce ».
Cette métaphore, non dénuée d’humour, signifie « se faire duper ». Elle désigne donc l’état d’un malheureux, le plus souvent naïf, qui se retrouve berné, après une affaire, un contentieux fâcheux.

Mais étudions d’abord l’étymologie de cette expression !
Son origine remonterait au Moyen-Age, où les « farces », courtes comédies dites « bouffonnes » et sociales, mettaient en scène des pères crédules, bafoués par des fils irrespectueux. Ils étaient alors déguisés en dindons, devenant ainsi, au sens propre comme au figuré, les « dindons de la farce ». La Farce de maître Pathelin, œuvre anonyme, illustre parfaitement, ce phénomène.

En outre, le terme « farce », dérivé de « farse », dont l’origine remonte au XIIIème siècle, signifie « moquerie », acquérant ainsi une connotation humoristique certaine. Par ailleurs, le terme « dinde », au caractère misogyne certain, désigne, depuis longtemps, une jeune fille niaise et naïve, se laissant aisément tromper. Par là-même, son masculin « dindon » qualifierait un homme dupe, facilement manipulable.

Dans son ouvrage de réflexion sociale intitulé L’Hermitte du faubourg Saint-Germain et publié en 1825, le critique Colnet écrit : « Ce qui m’amusait le plus, c’était les plaideurs et les dindons qui allaient se faire plumer, les premiers au Palais, les seconds à la Vallée ». Les « dindons » désignent bien sûr, dans cette maxime, des juristes corrompus. Par la suite, notre expression est mentionnée dans le Dictionnaire de l’Académie française, en 1832, où elle est clairement associée à l’adjectif « dupe ».

Au XXème siècle, le théâtre a largement contribué à populariser cette expression.
Ainsi Feydeau, dans sa pièce intitulée Le Dindon, publiée en 1896, fait la part belle à des êtres dupés. Auteur-phare de la Belle-Epoque, il a surtout rédigé des pièces comiques, faisant une satire acerbe de la bourgeoisie parisienne de son temps. Ses personnages, représentatifs d’une société hypocrite et légère, en prennent tous pour leur grade : épouses-modèles, maris volages, maîtresses importunes. Le Dindon relate les mésaventures de Pontagnac, dandy et coureur de jupons invétéré, pris à son propre piège, en cherchant à séduire la femme de son meilleur ami !

Le saviez-vous ? Les équivalents étrangers du « dindon de la farce » se révèlent à la fois drôles et originaux. Tandis que les Anglais utilisent le très culinaire « être farci », les Espagnols parlent d’« être l’âne de tous les coups », et les néerlandais disent « être pris dans le bâteau » !

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