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L'Essence de la modernité

L'Essence de la modernité

Par Rémi HUGUES

Thème : Essai / Etude autres

Date de publication : 17/01/2018

En affirmant quʼ« un agnosticisme rigoureux à lʼégard de lʼidée de modernité est peut-être impraticable », Paul Ricœur, devenu quelques années après sa mort une figure intellectuelle éminente de la République macronienne, admet dans son essai La Mémoire, lʼhistoire, lʼoubli que lʼâge moderne ne correspond pas à un déclin du religieux proprement dit, mais plutôt à la transformation radicale de la manière dʼappréhender la religion. Ne serait-il pas plus juste de considérer que la modernité a inauguré une époque nouvelle de flottement religieux et dʼespérance en un âge dʼor terrestre ? La modernité serait à cet égard une phase transitoire conduisant vers un futur que lʼhomme nouveau issu de la révolution de 1789 juge fort désirable. Cet ouvrage dévoile les coulisses de cet âge où lʼhumanité sʼest mise à croire en une utopie qui avait fait peau neuve.


  • Roman (134x204)
  • 292 pages
  • ISBN : 9782414171002
21,50 €
9,99 €
Papier
Numérique
 

Avis des lecteurs

Une réflexion utile - 09/04/2018

Voilà un essai dérangeant pour la rien-pensance qui régit aujourd’hui tant le « politiquement correct » que le « médiatiquement formaté », les deux piliers du nouveau façonnage sociétal qui incarnent précisément, dans ce qu’elle a de visible, « la modernité ». Pour l’auteur, « restreindre la définition de la modernité à une attitude donnée, indépendante de toute temporalité, est un écueil à éviter lorsque lʼon poursuit cette quête consistant à l’identification de son essence au sens socratique... » « La modernité n’est pas seulement un état d’esprit plus favorable au futur quʼau passé. Elle s’inscrit dans le temps, et secondairement dans l’espace. Ce volume a pour objet de préciser cet espace-temps, il ambitionne, on l’a dit, d’extraire l’essence de ce mot tant usité par nos contemporains. » Être « moderne » – le maître mot de Lionel Jospin, qui le mettait médiatiquement à toutes les sauces pour justifier ses décisions – n’est pas en fait une attitude nouvelle, spontanée, générée par un certain enthousiasme générationnel, c’est paradoxalement adhérer à un mode de pensée et d’action qui résulte d’un cheminement intellectuel précis débouchant sur un nouveau schéma sociétal où l’immédiateté reste, par nature, gage d’obsolescence. C’est précisément à l’analyse de ce cheminement, à la découverte de ses origines, à l’exposé de ses racines historiques, ethniques et religieuses et à l’élaboration de ses synthèses idéologiques, que nous convie l’auteur. Une analyse qui invite le lecteur à reconsidérer – à la lumière d’éléments judicieusement choisis et intentionnellement mis en regard – une image convenue et banalisée de la modernité où se conjuguent amélioration du confort, libertés individuelles exaltées jusqu’à la permissivité, mondialisme et démocratie... Un voyage dans le monde des idées qui nous transporte à travers tout le monde occidental depuis ses racines bibliques d’un judaïsme mythifié, débouchant sur le christianisme ciment de la royauté, jusqu’aux constructions messianiques du sabbataïsme et du frankisme qui influèrent directement les théoriciens révolutionnaires, maçons, républicains, puis marxistes ; ceux qui présideront à l’instauration de la laïcité devenue une dogmatique omniprésente dans notre idéologie politique moderne, gage de « rationalité ». Et Paul Ricœur s’interroge : « un agnosticisme rigoureux à lʼégard de lʼidée de modernité est peut-être impraticable. » L’auteur appuie sa démonstration sur une riche illustration bibliographique, qui s’avèrera d’autant plus dérangeante pour la bienpensance normative actuelle qu’elle en appelle bien souvent à des « monstres sacrés » consacrés au XXeme siècle comme Freud ou Marx, voire Lévinas pour ne signaler que ceux-là... Une analyse sans concessions qui n’hésite pas à s’attaquer courageusement aux mythes fondateurs de notre épopée civilisationnelle (tel le refus de l’existence de Moïse en tant que personne physique) pour relier à nos racines religieuses les plus anciennes les excès actuels d’un fondamentalisme régénéré en réaction au nom de la mystique, politique, de la modernité. Certains lecteurs, peu avertis de ces questions ou déjà trop sûrs des vertus dites démocratiques seront sceptiques à l’idée de supposer que le terrorisme islamique soit finalement favorisé par l’Atlantisme et s’avère objectivement le meilleur auxiliaire d’Israël, comme d’autres hésiteront à admettre que la révolution ukrainienne ait pu être financée par des intérêts sionistes, notamment par Soros instigateur par ailleurs de la création des femen... Un exemple parmi d’autres pour nous faire interroger sur les origines du féminisme, l’un des derniers avatars sociétaux de la modernité... Nous ne suivrons pas forcément l’auteur dans l’idée que les pyramides d’Egypte aient « survécu au déluge », ni dans l’hypothèse que gauchisme islamique est une création iranienne émergeant sur la scène politique à travers la personnalité de l’ayatollah Khomeiny, mais force est de constater que les idéologies violentes - qui s’épanouissent aujourd’hui dans l’islam salafo-wahhabite récemment rejeté par le sunnisme - trouvent leur origine dans les groupes extrémistes juifs tels les Sicaires, comme l’enseigne très justement le professeur de criminologie Bauer, maçon, ancien Grand Maître du Grand Orient... (L’islam iranien est chiite et n’obéit pas à cette philosophie...) Sur le plan économique cette modernité s’est traduite par l’émergence du capitalisme, comme elle s’est identifiée à la démocratie sur le plan sociétal. Une démocratie dont on sait aujourd’hui comment elle a été détournée par le marxisme triomphant et instrumentalisée par des appareils politiques dans les « républiques libérales » où elle sert toujours aujourd’hui de caution à leur légitimité. Cet essai est donc une réflexion utile pour tous ceux voient encore, dans cette modernité qui s’avère désormais agonisante, l’espérance d’un futur qui serait plutôt... un naufrage !