Tous les 2e mercredi du mois

L’autofiction

 

Vous avez en tête l’idée de parler de votre vie tout en voulant mettre un peu plus de piquant dans votre récit ? Eh bien, un genre littéraire est tout trouvé pour vous : l’autofiction.
Mais qu’est-ce donc encore que cela ? Pour vous expliquer, écrivons peu, mais écrivons bien : c’est une autobiographie romancée ! Eh oui, tout simplement ! Enfin… tout simplement, c’est vite dit quand même, hein ! En fin de compte, vous relatez des passages de votre vie en mêlant réalité et fiction, de quoi faire passer l’achat d’une baguette de pain pour un exploit insurmontable.
Mais comment vous y prendre sans tomber dans un nombrilisme roué à toute épreuve ? Préparez carnet et crayon puis suivez-nous…

Écrire une autofiction
 
Un peu d’histoire
Jean-Jacques Rousseau

Tout d’abord, d’où est né le mot « autofiction » ? Il faut savoir que ce néologisme est très récent. De 1977, exactement !

C’est l’écrivain Serge Doubrovsky qui en est l’inventeur… mais pas du genre littéraire qui, lui, date de bien plus longtemps que cela (personne, en effet, avant lui n’avait pu ou eu l’idée de mettre de nom dessus) ! Rousseau, par exemple, en était déjà friand…

Fermons là la parenthèse pour revenir à nos moutons, voulez-vous ?

 
Comment construire votre récit ?

Vous n’êtes pas sans savoir que l’auteur, le narrateur et le héros seront une seule et même personne : vous ! Donc, en toute logique, votre récit sera rédigé à la première personne du singulier, bien que rien ne vous interdise d’utiliser la troisième personne.

Ensuite, du fait que vous vous lanciez dans l’écriture d’une autofiction, il vous faudra suivre la construction d’un roman, avec ses fondations de base, c’est-à-dire que vous devrez placer le décor en décrivant une situation, trouver un élément déclencheur avec tous les événements qui s’ensuivront et imaginer le dénouement qui résultera de tout cela. Mettez-vous bien en tête qu’il ne s’agit pas là d’une autobiographie dans laquelle des faits réels sont platement relatés dans un enchaînement chronologique. Il vous faut donc mettre de l’action dans votre récit afin de donner un peu plus de relief à l’électrocardiogramme de votre lecteur.

Quand vous aurez mis tous ces points importants en place, il sera temps pour vous d’entrer en scène !

 
Et comment rédiger votre autofiction ?

Rappelez-vous que vous racontez les aventures que votre personnage, soit vous, a vécues. Pour ce faire, n’oubliez pas d’y insérer des passages ou des détails fictifs pour étoffer et donner vie à votre histoire. Il vous est tout à fait possible de changer des dates, des lieux, des noms pour brosser un tableau plus romanesque que ce que votre mémoire vous décrit. D’ailleurs, vos souvenirs ne sont-ils pas tronqués par le temps, par les sentiments ? N’a-t-on pas tous envie d’avoir une vie plus pimentée, plus rythmée, plus sensationnelle, plus… ? N’a-t-on pas besoin, quelquefois, de vivre des événements qui nous sortent de notre train-train quotidien ? Eh bien, c’est le moment d’en faire part à votre lecteur qui n’attend que ça, en réalité. Il a besoin de s’imaginer vivre ces aventures, lui aussi. Un simple détail peut vite être romancé, parce que vous l’aurez brodé au point de lui donner un intérêt qui l’extirpe de son contexte, à l’origine, d’une banalité à pleurer.

Imaginons une scène, par exemple : « Un jour, on m’a volé mon portefeuille. » OK, c’est dommageable, mais ensuite ? se dira le lecteur en soif de rebondissements. Alors, vous vous remémorerez ce passage de votre vie et broderez autour en décrivant l’environnement, le sentiment qui vous aura assailli à ce moment-là, etc. « Un jour, alors qu’il pleuvait à verse et que j’étais perdu dans une rue vidée de toute âme et mal éclairée, je fus bousculé par un type à la mine patibulaire d’où se lisaient la haine et la détermination. Je ressentis à cet instant de l’effroi, ne sachant ce qu’il avait en tête. Il me colla au mur, une arme certainement cachée sous son manteau, et fouilla dans la poche intérieure de ma veste afin de la vider de son contenu, puis me projeta au sol avant de s’enfuir… » Bref, c’est une façon de présenter ce fait avéré : le vol du portefeuille. Mais le reste est-il réel ou uniquement né de votre imagination ? N’était-ce pas seulement un pickpocket qui sera passé à l’acte à votre insu ? Seul vous aurez la réponse.

Au voleur !
Toutefois, derrière cette autofiction, ne vous croyez pas à l’abri des foudres des personnes que vous aurez attaquées en pensant vous en éloigner en modifiant les lieux, les noms, les dates ou autres.
Donc, attention aux mots que vous choisirez, un petit passage chez monsieur ou madame le juge pourrait bien vous pendre au nez ! Si vous avez divorcé et que vous décrivez votre femme telle une mégère non apprivoisée, ou votre mari tel un satyre sans foi ni loi, sortez le parapluie et préparez-vous à une pluie d’invectives… On vous aura prévenu !

 
Comment dépeindre votre personnage ?
Mon histoire romancée

En début d’article, nous avons utilisé le terme « nombrilisme », pour quelle raison ? En créant son propre personnage, on aurait tendance à vouloir le brosser dans le sens du poil, le décrire tel un être qui définit à lui seul la perfection, à la limite de la prétention qui peut en exacerber plus d’un.
Non, surtout pas ! Vous risqueriez de lasser le lecteur qui, pour s’immerger dans le récit, a besoin de s’identifier à lui. Que vous ayez en tête l’idée de faire de vous un héros, c’est tout à fait normal, mais il faut aussi que celui-ci soit crédible, humain, avec ses forces et ses faiblesses. Vous n’allez tout de même pas faire de vous un superhéros sans peur et sans reproche ! Qui goberait une telle ineptie ?
Donc, rangez votre panoplie de Spiderman et reprenez votre texte pour le rendre plus plausible. Rappelez-vous qu’il s’agit avant tout d’une autobiographie romancée, et non d’un roman pur souche !

 
En conclusion

Vous pouvez enfin vous lancer dans cette belle aventure d’écriture, maintenant que vous avez quelques conseils pour y parvenir. N’oubliez pas ! Une autofiction n’est pas une autobiographie ou un roman. Non, non, ce sont bien les deux réunis. Au moins, si votre cœur balance, il aura trouvé l’équilibre avec ce genre littéraire. Vous pourrez ainsi partager votre vie que vous aurez rendue croustillante, et donc extraordinaire, avec un lectorat qui, à l’origine, n’aurait certainement trouvé aucun intérêt à connaître quoi que ce soit de votre existence qui lui aurait semblé banale.

 
 

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