Le curé d'une paroisse située dans une cité ouvrière, qualifiée de « rouge et socialiste», dont le nombre de ses ouailles ne cesse de diminuer, autorise et participe activement à la construction d'une mosquée sur un terrain appartenant à l'église catholique, pour émigrés musulmans d'origine maghrébine. Voilà qui sort de l'ordinaire, quand on sait que les deux religions, en l'occurrence la croix et le croissant, n'ont jamais fait bon ménage et qu'elles étaient souvent en conflit ouvert. Pourquoi cette aide entre un curé et une communauté musulmane ? Celle-ci, déracinée et sans repères, connaîtra d'énormes problèmes fort épineux, et quoique n'ayant pas forcément la même conception du monde et d'organisation que le curé bienfaiteur, fait mine d'accepter cette aide en apparence désintéressée. Cette entente et cette entraide laisseront perplexe plus d'un observateur. Sommes-nous entrés dans une nouvelle ère, celle d'une alliance entre ces deux religions ?
Ce récit, qui s'apparente à une chronique sociale, est plus qu'un hymne à la tolérance, car il lève aussi le voile sur le rôle des intérêts économiques. Il ne faut pas perdre de vue que les pays d'accueil étaient satisfaits d'avoir une main-d'œuvre bon marché, et les gouvernements des pays d'origine l'étaient encore plus, voyant dans ces ouvriers une source de devises étrangères qui renflouaient les caisses de l'état souvent en déficit permanent. On poussa le cynisme plus loin, sous le couvert fallacieux de défendre leurs droits, on fit tout pour les encadrer pour mieux les tenir et les préserver des idées néfastes, qui seraient contraires à la foi musulmane. Sur le plan social, les pays d'accueil ne firent aucun effort pour préparer ces ouvriers émigrés à leur nouvelle situation de prolétaires et faciliter ainsi leur intégration dans la société européenne. Du côté des employeurs, on ne vit en ces ouvriers qu'une main-d'œuvre docile et on négligea volontiers de voir en eux des hommes, ayant des mœurs, des traditions propres auxquelles ils tiennent à tout prix. Nombreux furent ceux qui eurent des difficultés insurmontables pour trouver leur place dans une société matérialiste.