Interview écrite

20 décembre 2012
Posté par
Flora

Rencontre avec Michel Gautheron, auteur de « Sortir »

Michel Gautheron, présentez-nous votre ouvrage Sortir ?
Sortir n’a pas été conçu comme un projet. Il rassemble des textes assez différents dans leur manière, écrits sans continuité sur une période de 30 ans. Pour autant, ces nouvelles ne sont pas sans lien, elles ont creusé dans l’opacité du réel leurs galeries vers la même espérance ineffable. J’ai tenté de relier ces galeries, de les organiser en cheminement, en réseau. De structurer, au niveau de la composition, une volonté peu consciente et sans doute obsessionnelle. Au fond, Sortir fonctionne comme un poème.

 

Comment vous êtes-vous mis à l’écriture ?
L’écriture, ce fut d’abord – et c’est toujours – la poésie, justement. Le propos sans propos. La chose qui naît, monstrueuse, des mots qu’on croit connaître : cette chose vivante, qui vous ressemble. Il suffit d’écrire un mot pour que naisse ensuite le poème. La narration, le roman, c’est autre chose. On sert une intention, on veut développer un projet. Or la difficulté n’est pas là tant de composer, de structurer, que de se laisser surprendre, de laisser opérer la magie poétique. Un roman trop rigoureusement planifié échapperait à la littérature, un bon roman est toujours un poème.

D’où vous vient votre inspiration ?
Flaubert ironise dans le Dictionnaire des Idées reçues :  » Insipration poétique – Choses qui la provoquent : la vue de la mer, l’amour, la femme etc « . Il faut comprendre ce mot dans sa première acception : inspirer, c’est respirer. On est inspiré comme on respire. Pour celui qui écrit, c’est une attitude presque réflexe, dans le langage qui étouffe ce qui veut être dit. Je suis inspiré : je prends dans le langage l’air qui donne vie au poème. Selon quelle chimie laborieuse, très indéfinissable, d’essais, d’erreurs, d’échecs, de résultats fortuits ? (Air – synonymes : allure, aspect, attitude, tournure, il faut admettre aussi, bien sûr, le sens qui réfère à la musique.)

Pourquoi avoir choisi ce style d’écriture ?
Choisit-on un style ? Il s’impose de lui-même, me semble-t-il. On choisit des personnages, des situations, des actions, un temps, des espaces, des points de vue…Le style, c’est la façon de gérer tout cela. On n’en prend guère conscience qu’après l’écriture : ça convient ou ça ne convient pas. Si ça ne convient pas, on recommence. Camus réécrit son roman au passé composé, et c’est L’Etranger.

A quel type de lecteur s’adresse votre ouvrage ?
Le lecteur ne devient lecteur qu’en lisant l’œuvre, des types de lecteurs, cela supposerait des types d’œuvres. Or l’œuvre veut échapper toujours à toute typologie en ce qu’elle prétend à la nouveauté. Il n’y a qu’un type de lecteur : le lecteur curieux.

Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Je travaille actuellement à un roman : les années 50 à 90, un village, une petite ville, un homme, son père, un ami, une femme, des voisins, le besoin de la confiance dans un monde décevant… Mais il est impossible de rendre compte de ce qui n’est pas écrit.

Un mot pour vos lecteurs ?
Le lecteur n’est rien sans l’auteur. A l’inverse l’auteur, c’est la même évidence, n’existe que par son lecteur. Quel mot pourrais-je ajouter aux 42 592 que, selon mon logiciel, le lecteur de Sortir a entendus ? Sinon celui-ci :  » A suivre « , comme on peut dire, plein de reconnaissance :  » à demain  » aux gens qui vous font vivre.